02/08/2025 chroniquepalestine.com  8min #286085

 La conférence de l'Onu sur la solution à deux États marquée par l'absence d'Israël et des États-Unis

La raison de la remise en selle de la « solution à deux états », c'est l'éradication de la résistance


Combattants des Brigades Ezzedine al-Qassam, la branche armée du mouvement Hamas (résistance palestinienne islamique) - Photo : Archives

Par  Abdel Bari Atwan

Le débat actuel sur la reconnaissance d'un État palestinien occulte la guerre d'extermination et la famine dans la bande de Gaza, et confère une « légitimité » aux exigences et conditions israéliennes visant à désarmer la résistance, considérée comme un obstacle à la création de cet État.

C'est pourtant l'État d'occupation israélien qui a transformé la bande de Gaza en un cimetière à ciel ouvert, tuant plus de 60 000 martyrs à ce jour, en blessant 150 000 autres et en détruisant complètement les infrastructures et 85 % des habitations.

Il y a quatre points sur lesquels il faut s'arrêter pour confirmer les intentions réelles derrière ces initiatives visant à reconnaître cet État fantôme, obsolète et trompeur, et à le faire renaître de ses cendres :

  • Premièrement : l'annonce par le Premier ministre britannique Keir Starmer que son pays reconnaîtra officiellement l'État palestinien en septembre prochain, à moins qu'« Israël » ne prenne certaines mesures telles que l'amélioration de la situation dans la bande de Gaza, montre bien que la prise de position n'est pas une affaire de conviction ou de principe, mais qu'un vague compromis, ni plus ni moins.
  • Deuxièmement : le report de cette reconnaissance de l'État fantôme au mois de septembre prochain, et non pas maintenant, revient à donner à « Israël » plus d'un mois pour terminer son travail d'extermination par la faim ou par les balles de deux millions d'habitants de la bande de Gaza, et de les expulser de force vers le Sinaï ou d'autres pays très éloignés de la Palestine, tels que la Libye, l'Indonésie et l'Éthiopie.
  • Troisièmement : l'accord des pays qui ont participé à la conférence sur la solution à deux États à New York pour préparer la création de cet État en lient celle-ci au désarmement de la résistance, c'est-à-dire du  Hamas et du  Jihad islamique, et à sa remise à l'« Autorité palestinienne ». Il est frappant de constater que six pays arabes ont approuvé cette mesure, dont l' Égypte, l' Arabie saoudite et le  Qatar.
  • Quatrièmement : l'opposition de Trump, le chef d'État qui dirige le prétendu « monde libre », à la création de cet État, même sur le papier, qui considère comme une « récompense » pour le mouvement « Hamas », implique que le « veto » américain est prêt, accompagné du bâton américain, et que certains de ses alliés arabes seront les premiers à reculer et à se coucher à ses pieds.

Aucun des pays qui ont brandi la possible reconnaissance de l'État palestinien n'a osé condamner l'État occupant et exiger des sanctions à son encontre, comme l'ont fait la  Russie, la Corée du Nord, l' Afghanistan, l' Irak, la  Libye et l' Iran, parmi d'autres.

Plus grave encore, certains de ces pays, comme la  Grande-Bretagne et la  France, continuent de fournir à Israël les munitions, les missiles et les armes modernes sophistiquées qu'il utilise dans sa guerre d' extermination et d' affamement dans la bande de Gaza, afin d'anéantir sa population.

Vingt-deux mois de négociations au Caire et à Doha sous l'égide des États-Unis n'ont absolument pas réussi à empêcher la guerre d'extermination, à ouvrir les points de passage pour l'entrée de l'aide alimentaire et des médicaments, ni à empêcher le bombardement des hôpitaux.

Ces gens peuvent-ils établir un État palestinien, et où, dans la bande de Gaza détruite, ou en Cisjordanie, que la Knesset israélien a « légalement »  annexée après l'avoir fait de facto ?

Nous sommes surpris par cette « célébration » de l'annonce par certains pays de leur intention de « reconnaître » l'État palestinien, comme s'il s'agissait du fameux remède d'Archimède qui allait changer le monde et résoudre tous les problèmes de la planète, et en particulier ceux du Moyen-Orient. Il est peut-être utile de rappeler le proverbe populaire qui dit : « La montagne accouche d'une souris ».

Voici quelques remarques à ce sujet :

  • Premièrement, la  déclaration de Balfour, qui a donné aux juifs le droit de construire leur État sur la terre palestinienne, avait pourtant affirmé le respect et la non-violation des droits du peuple palestinien.
  • Deuxièmement, la résolution 181 sur le partage de la Palestine, adoptée par les Nations unies en 1947, recommandait la création d'un État pour les Palestiniens aux côtés de l'État d'occupation israélien.
  • Troisièmement, la résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations unies, adoptée après la guerre de juin 1967, a également confirmé la création d'un État palestinien et a été reconnue par l'Organisation de libération de la Palestine.
  • Quatrièmement, les  accords d'Oslo, signés en septembre 1993, dont les promoteurs et les signataires, qu'ils soient palestiniens, israéliens ou américains, ont reçu le prix Nobel de la paix, ne prévoient-ils pas la création d'un État palestinien ?
  • Cinquièmement, la  commission internationale quadripartite formée en 2002 n'a-t-elle pas établi une feuille de route pour la création d'un État palestinien, avec la participation des Nations unies, de la Russie, des États-Unis et de l'Union européenne, afin de mettre fin à l' Intifada palestinienne qui a secoué l'entité sioniste ? Où est-elle aujourd'hui et où est sa feuille de route ?
  • Sixièmement, 142 pays, dont la France, n'ont-ils pas reconnu de fait l'État palestinien indépendant en Cisjordanie et dans la bande de Gaza lors d'une réunion de l'Assemblée générale des Nations unies ? Qu'y a-t-il de nouveau aujourd'hui ?
  • Septièmement, l'administration Obama, avec le soutien de Tony Blair et du Dr Salam Fayyad, n'est-elle pas venue en 2007 pour préparer les infrastructures de l'État palestinien, que le président américain avait promis de créer dans les deux ans suivant l'Assemblée générale des Nations unies ?

Cette vague théâtrale et mondiale, menée par certains pays européens en particulier, et centrée sur la « promesse » de reconnaître un État palestinien, vient à la rescousse d'Israël face à la campagne de détestation massive et croissante dont il fait l'objet dans le monde entier, et en Occident en particulier, après avoir échoué à atteindre aucun des objectifs de son agression contre la bande de Gaza, notamment la libération des captifs, l'élimination de la  résistance armée dans la bande de Gaza et le déplacement de ses habitants.

Il est douloureux de constater que l' Autorité de Ramallah, qui a commis la plus grande trahison de l'histoire, moderne et ancienne, en se transformant en un  instrument au service de l'occupation de la terre palestinienne, est l'une des plus ferventes partisanes de cette reconnaissance illusoire d'un État, ignorant le fait indéniable qu'elle quémande depuis 32 ans l'application par Israël des accords d'Oslo, tandis que l'État occupant avalait la Cisjordanie et y installait 850 000 colons en récompense de sa « coopération », et qu'elle parachève son processus d'annexion par une  décision législative du Knesset.

C'est une grande supercherie que cette reconnaissance, verbale, sur le papier et trompeuse, d'un État palestinien, et par qui ? Par ceux qui fournissent à Israël des  armes, de l'argent, des moyens pour ses programmes  nucléaires, avec le soutien de certains  dictateurs arabes.

Nous n'achetons pas d'illusions et nous ne voulons pas que notre nation se fasse piquer dix fois par le même aiguillon sans en tirer les leçons.

Nous suivons l'exemple du grand poète et penseur  Muin Bseiso, fils de Gaza, qui a dit dans l'un de ses poèmes : « Si tu parles, tu meurs, si tu te tais, tu meurs, alors parle et meurs ! ».

Auteur :  Abdel Bari Atwan

* Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du journal numérique  Rai al-Yaoum. Il est l'auteur de  L'histoire secrète d'al-Qaïda, de ses mémoires,  A Country of Words, et d' Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter :  @abdelbariatwan

30 juillet 2025 -  Raï-al-Yaoum - Traduction :  Chronique de Palestine

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